Les meilleurs films de... janvier 2021

La tradition se poursuit! Afin de ne rien oublier lorsque viendra le temps du palmarès en décembre prochain, mieux vaut déjà établir une liste des meilleurs films qui sont sortis à chaque mois. Qu'en-est-il de janvier 2021?

Wolfwalkers

The Dissident

Las Ninas Bien

The Climb

Promising Young Woman

True Mothers

Préparons-nous à rester ensemble pour une durée indéterminée

Swimming Out Till the Sea Turns Blue

Film du jour: ... And Justice For All

Produit de son époque, ... And Justice For All (1979) de Norman Jewison est un drame juridique tellement plongé dans la satire que ses excès explosent régulièrement, limitant la tenue de son impact tout en rendant l'ensemble incroyablement divertissant. Le récit va-et-vient en évacuant ses enjeux principaux, Al Pacino en fait des tonnes... et cela fonctionne plus souvent qu'autrement tant l'humour noir coule à flot. ***1/2

Film du jour: Le gai savoir

À l'origine, Le gai savoir (1969) devait être une adaptation des textes de Rousseau pour la télévision française. Évidemment, Jean-Luc Godard a détourné cette commande pour en faire un exposé à la fois intellectuel et ludique sur les images et le son, annonçant le monde de demain et, par la même occasion, le cinéma qu'il pratique encore aujourd'hui. L'exercice peut paraître ardu et prétentieux s'il est pris au pied de la lettre, alors qu'il demeure au contraire amusant et libre, dans ses choix - humanistes, sociaux, artistiques... - et ses contradictions. ***1/2

Sorties cinéma: True Mothers, Préparons-nous à rester ensemble pour une durée indéterminée, The Night

Trois films très différents s'avèrent les nouveautés cinématographiques les plus intéressantes de la semaine...

True Mothers: Sélection du Japon aux Oscars, la nouvelle création de Naomi Kawase revient à ses premières obsessions (l'adoption) tout en préservant les éléments mélodramatiques de ses plus récents efforts. Cela en résulte une oeuvre puissante, pas tant pour son scénario elliptique et un peu trop narratif, que pour la justesse de ses bouleversantes interprètes et l'intégration de la nature qui, comme toujours chez elle, guide le rythme en devenant le principal personnage. La beauté des images apporte d'ailleurs la lumière nécessaire afin d'espérer des jours meilleurs. ***1/2

Préparons-nous à rester ensemble pour une durée indéterminée: Les amateurs de Kieslowski seront comblés par cet énigmatique thriller romantique sur le destin. Lorsqu'une neurochirurgienne quitte tout pour un homme qui ne se rappelle même pas d'elle, les mystères débutent et ils passionnent malgré une conclusion trop explicative. On voudra y adhérer seulement pour la composition habitée de Natasa Stork. ***1/2 Ma critique

The Night: Dans le sillon de Shining se trouve ce drame iranien de Kourosh Ahari sur une famille qui n'aura aucun autre choix que d'affronter leurs démons lors d'un séjour à l'hôtel. Tendu et intrigant, ce suspense horrifique où l'inconscient du père semble se matérialiser à l'écran ne manque pas de sursauts simplistes et d'effets appuyés (comme la finale plus ou moins convaincante), arrivant néanmoins à convaincre par la dévotion de ses comédiens et la sensibilité de certains thèmes abordés. ***

Film du jour: The Oh in Ohio

Malgré leur acharnement, Parker Posey, Paul Rudd et Danny DeVito sont incapables de sauver The Oh in Ohio de l'insignifiance. À partir de sujets prometteurs - problèmes sexuels, usure du couple, quête identitaire -, le réalisateur et scénariste Billy Kent signe une comédie rarement amusante, plus sexiste qu'émoustillante, qui débute dans la farce primaire pour tenter par la suite une émotion qui ne fonctionne pas. Reste le plaisir, très relatif, de voir des comédiens charismatiques nager pour rien. **

Film du jour: Guy and Madeline on a Park Bench

Dès son premier film Guy and Madeline on a Park Bench (2009), on retrouvait déjà l'essence du cinéma de Damien Chazelle (La La Land), grand amateur de jazz et de comédies musicales, qui adore les classiques américains (Cassavetes et compagnie) et la Nouvelle Vague (principalement Godard). Cela donne une belle histoire d'amour enchantée, magnifiquement tournée en noir et blanc et montée avec style, qui n'est pas sans prétention et tics, mais qui impose un immense talent. ***1/2

Film du jour: Fury

Premier film américain de Friz Lang, Fury (1936) est une charge enragée contre les lynchages publics, confrontant un homme accusé à tort (Spencer Tracy, excellent) au pouvoir démoniaque de la Foule. Haletant et passionnant malgré une finale mièvre imposée par le studio, le long métrage captive, à la fois dans la feu de l'action que sur le terrain juridique. ****

Come Play (Blu-ray)

Passé un peu inaperçu à cause de la pandémie, Come Play de Jacob Chase vient de sortir dans le confort de son foyer. (Universal)

C'est quoi? Un monstre issu d'une application numérique aimerait bien devenir ami avec un enfant autiste.

C'est comment? Ce drame horrifique ne manque pas d'humour et la métaphore sur la maladie s'avère probante. Quelques séquences tendues bénéficient d'une mise en scène minutieuse.

Et pourtant? L'ensemble aurait pu être plus effrayant et les talentueux comédiens font ce qu'ils peuvent dans des rôles plus ou moins bien développés.

Techniquement? La photographie sombre et soignée devient le terrain de jeu idéal afin de faire triompher les ombres et les contrastes de qualité. Les pistes sonores précises font sursauter allègrement.

Suppléments? Cette édition comprend un blu-ray et une copie numérique. Il n'y a aucun bonus à l'horizon.

Au final? Ce divertissement efficace quoique oubliable fait passer un bon moment et sa satire de la technologie ne marquera pas de toucher des cordes sensibles dans un monde dominé par les écrans.

Ma critique

Film du jour: Terre de sorciers

Film inachevé de Raoul Ruiz, Terre de sorciers (2007) s'apparente à un beau bordel mêlé d'allégories et de paraboles sur le Chili, la mémoire, les traditions, le diable et bien plus encore. 2 heure 40 minutes de va-et-vient un peu incessant, magique et frustrant dans sa création lâche, sa photographie qui laisse parfois à désirer et le jeu outrancier de ses comédiens. S'il y a plein de choses à reprocher à l'exercice, on finit toutefois par être séduit par sa liberté, son ironie et ce chaos permanent où le temps s'arrête. ***

Film du jour: Mountain Patrol

Bien avant sa controversée fresque City of Life and Death et son documentaire Born in China pour DisneyNature, Lu Chuan était ce cinéaste prometteur qui avait impressionné les cinéphiles avec Mountain Patrol (2004), un opus rugueux et rigoureux sur une escouade spéciale qui part à la recherche de contrebandiers. Avec ses fondations axées dans le documentaire (le traitement du sujet, l'apport de non-acteurs), ce récit de survie ne manque surtout pas de caractère et d'authenticité. Puis s'il y a une seule raison de ne pas rater le voyage, c'est pour assister aux magnifiques paysages du Tibet qui en mettent régulièrement plein la vue. ***1/2

Film du jour: Bizalom

En compagnie de Béla Tarr, Istvan Szabo fut sans doute le plus grand cinéaste hongrois des 40 dernières années. Son heure de gloire mondiale est arrivée en 1980 avec la sortie de Bizalom (Confidence en anglais et Confiance en français), utilisant l'horrible Histoire passée (la Seconde Guerre mondiale) afin de créer un drame psychologique d'une rare intensité. Devant jouer face au monde le rôle de mari et femme, un homme et une femme doivent apprendre à maîtriser leurs pulsions, alors qu'une fausse confidence - à cette époque, les traîtres sont partout - pourrait leur être fatale. Verbale et viscérale, cette oeuvre arrive à la fois à être théâtral dans son canevas et extrêmement cinématographique, remplissant peu à peu l'écran d'ombres furtives et tentatrices. ****

Film du jour: The Cremator

Possiblement le long métrage le plus éclaté de la nouvelle vague tchèque, The Cremator (1969) de Juraj Herz mélange le film de genre horrifique, l'expressionnisme allemand et la satire sardonique maculée d'humour noir afin d'offrir une vision hilarante et cauchemardesque du climat d'avant-guerre, alors que le directeur d'un crématorium n'a aucun autre choix que de collaborer avec le régime nazi. Porté par une prestation dérangeante de Rudolf Hrusinsky, cette oeuvre hors norme ne lésine pas sur les ingénieux plans de caméras, où un montage excentrique et une photographie élaborée participent à ce malaise généralisé. ****

Sorties cinéma: Las Ninas Bien, You Will Die at Twenty, L'enfant rêvé

Le froid de janvier ne viendra jamais à bout des nouveautés cinématographiques, dans le confort de la maison en raison de la pandémie qui semble sans fin. Cette semaine, on pourra découvrir...

Las Ninas Bien: Présentée au TIFF en 2018, cette brillante satire d'Alejandra Marquez Abella suit le quotidien doré d'une épouse qui constate peu à peu que tout n'est pas si rose sous le soleil. Liant son existence à la crise économique qui a affecté le Mexique au début des années 80, l'ensemble est volontairement plus doux-amer qu'acerbe, dévoilant les points de ruptures et humiliations de classes sociales nanties, dessinant une héroïne - mémorable Ilse Salas - dans ce qu'elle a de plus sincère et grotesque. Via le Cinéma Moderne. ***1/2

You Will Die at Twenty: Ce rare film soudanien qui confronte l'obscurantisme à la liberté rappelle l'importance de vivre pleinement, au contact de la beauté des environs et du cinéma. Parfois floue, sa narration s'enrichit d'un riche travail esthétique et d'un passage plus que souhaité vers la fable. À condition qu'on lui pardonne son rythme parfois indolent, c'est l'occasion de découvrir le réalisateur Amjad Abu Alala qui, est à son premier long métrage, pourrait très bien être l'héritier de Youssef Chahine. ***

L'enfant rêvé: Le désir de paternité est au coeur du nouveau film de Raphaël Jacoulot (auteur du très beau Avant l'aube avec le regretté Jean-Pierre Bacri), faisant vibrer le trop rare Jalil Lespert qui trouve un rôle ambigu qui lui va comme un gant. Si seulement le récit à la Chabrol qui mélange drames familiaux et suspense sortait davantage des sentiers abattus, en offrant par exemple de la substance à ses personnages féminins ou une finale moins conventionnelle. Au moins la nature est filmée avec soin et délicatesse. **1/2

Film du jour: The Boy in the Striped Pajamas

Adapté du roman du même nom portant sur l'amitié entre deux garçons en temps de guerre, The Boy in the Striped de Mark Herman sent la qualité anglaise à plein nez: sujet important, distribution de classe, musique tombant toujours au bon endroit, etc. Il manque cependant souffle et émotion à cette mise en scène conventionnelle et poussiéreuse, dont les enjeux tardent à passionner, si ce n'est dans les 20 dernières minutes, bouleversantes à souhait. **1/2

Film du jour: Leningrad Cowboys Go America

Entre deux projets conséquents, Aki Kaurismäki s'amusait avec des petits films ludiques. C'est le cas de Leningrad Cowboys Go America, où un groupe musical scandinave parcoure les États-Unis. C'est le rêve américain à la sauce absurde, dont les traits d'observation font instantanément sourire. Évidemment, le tout s'essouffle rapidement et le récit ne tarde pas à se répéter, mais il est plutôt impossible de ne pas prendre son pied et de taper, justement, du pied. ***

Film du jour: Généalogies d'un crime

Raoul Ruiz s'amuse comme un petit fou dans Généalogies d'un crime (1997), une oeuvre complètement imprévisible qui change constamment de style cinématographique et même d'art, jouant aisément avec la notion d’interprétation tout en saupoudrant le tout de miroirs difformant L'exercice ludique ne serait pas sans rappeler un Desplechin méta où viennent se greffer d'excellents comédiens (Deneuve, Piccoli, Poupaud, Amalric) qui délirent à qui mieux-mieux dans cette intrigue touffue de crimes et de mystères. ***1/2

Film du jour: The Climb

Maintes fois repoussé à cause de la pandémie, The Climb de Michael Angelo Covino sort aujourd'hui en vidéo sur demande. Il s'agit d'un des films les plus drôles des dernières années, ressassant la relation d'amour et de haine de deux amis. Ancré dans la culture française (des chansons de Nicole Martin, Gilbert Bécaud et Stéphane Venne, un clin d'oeil au classique Grand amour de Pierre Étaix), l'ensemble est porté par deux comédiens épatants et une mise en scène étudiée - chose rare quand vient le temps de faire de la comédie - qui multiplie les longs plans souvent en mouvements. L'idéal pour s'aérer l'esprit en ce début d'année. ***1/2

Film du jour: Dreamland

Margot Robbie brille dans Dreamland de Miles Joris-Peyrafitte, une oeuvre imparfaite qui attire néanmoins le regard. (Paramount)

C'est quoi? Une femme recherchée des autorités reçoit l'aide d'un jeune homme mal dans sa peau.

C'est comment? Le long métrage est esthétiquement éblouissant. La réalisation assurée multiplie les plans soignés.

Et pourtant? Le scénario n'est pas aussi impressionnant. Le mélange entre le western et le récit d'initiation manque de nerfs (le traitement du rêve américain s'avère superficiel), alors que Finn Cole fait pâle figure dans le rôle principal.

Techniquement? La photographie de grande qualité bénéficie d'un travail méticuleux sur les contrastes et la palette de couleurs. La piste sonore précise met l'emphase sur les dialogues.

Suppléments? Cette édition comprend un blu-ray et un code numérique. Il n'y a aucun bonus.

Au final? Disponible dès demain en format dvd et blu-ray, cette production stylisée demeure parfois plus belle à regarder qu'à suivre. Mais quelle richesse justement de s'y perdre à l'écran!

Jungleland (dvd)

Le pouvoir de la fratrie prend tout son sens dans Jungleland de Max Winler, qui vient tout juste de sortir en dvd. (Paramount)

C'est quoi? Un boxer et son frangin doivent escorter une jeune femme afin de pouvoir participer à un tournoi.

C'est comment? La chimie entre Charlie Hunnam et Jack O'Connell coule de source et il y a plusieurs moments émouvants rappelant que le rêve américain n'est pas accessible à tous.

Et pourtant? L'histoire n'est pas toujours très développée, le rythme plutôt ankylosé et la mise en scène manque de panache.

Techniquement? La photographie inspirée des années 70 (tons de bruns omniprésents) est relevée par des images détaillées. La pistes sonore anglophone en Dolby Digital 5.1 s'avère précise, permettant de saisir parfaitement les dialogues et les mélodies vibrantes de Lorne Balfe.

Suppléments? Cette édition comprend un dvd et une copie numérique. Il ne faut pas chercher les bonus, car il n'y en a aucun.

Au final? En peinant à sortir des sentiers battus, cette honnête production risque de s'oublier rapidement. Est-ce que l'apport des comédiens fera oublier qu'il ne s'agit que d'une variation mineure sur The Fighter? Rien n'est moins sûr.

Film du jour: A Cry in the Dark

Inspiré d'une histoire vraie, A Cry in the Dark (1988) de Fred Schepisi relate la mort brutale d'un enfant et le procès qui s'ensuit, alors que le poids public et journalistique tendent à brouiller régulièrement les cartes. Sobre et enrageante, l'oeuvre marque principalement les esprits par la nature de son sujet et la complexité de ses rôles: Sam Neil qui est plongé dans une crise de foi et, surtout, Meryl Streep, glaciale et imperturbable dans la peau d'un personnage insaisissable récompensé à Cannes. ***1/2

Film du jour: Kings of the Road

Dernier tome de sa trilogie sur la route, Kings of the Road (1975) est un des films les plus libres de Wim Wenders. Largement improvisée, cette fresque de près de trois heures abandonne la narrativité classique - deux inconnus décident de voyager ensemble - afin de prendre le pouls du pays, de l'époque, de la masculinité, de l'amitié, du manque de repères et de l'état du cinéma. Un large programme doux-amer qui offre tout un voyage visuel (la photographie en noir et blanc est majestueuse) et sonore, annonçant déjà le classique Paris, Texas. ****

Sorties cinéma: Promising Young Woman, The Delivered, Climate of the Hunter, My Little Sister, Once Upon a River, The Marksman

Le septième art n'a pas dit son dernier mot et même s'il se déroule en ligne, il propose cette semaine de beaux personnages féminins.

Promising Young Woman: Voici un film qui risque de résonner fort à l'ère du #metoo. Entre la satire horrifique et le drame du quotidien, ce premier long métrage d'Emerald Fennell ratisse large, plongeant l'incroyable Carey Mulligan dans une quête particulièrement ambiguë alors qu'elle tente de purger les démons de son passé. Une oeuvre forte, tragique et sardonique qui donne froid dans le dos. ***1/2

The Delivered: Le trop rare cinéaste Thomas Clay est de retour avec ce western féministe sur une mère de famille qui tente de s'émanciper dans un monde dominé par les hommes. Excessif et éparpillé, l'ensemble violent à ses heures n'en demeure pas moins satisfaisant, gracieuseté d'interprètes convaincus et d'une réalisation alerte. ***

Climate of the Hunter: Présenté à Fantasia, le nouvel essai du prolifique Mickey Reece conserve sa propension pour les dialogues abondants, les joignant à un esthétisme soigné influencé par les années 70 (par son format et ses emprunts à Bergman), du vampirisme et des rêves complètement cinglés. Cela donne une oeuvre joyeusement absurde, dont les délires s'avèrent toutefois plus intéressants que le résultat final qui tend à traîner en longueur. ***

My Little Sister: Choix de la Suisse aux Oscars, la plus récente création de Stéphanie Chuat et Véronique Reymond suit une femme qui prend soin de son frère jumeau malade. Face à un scénario chargé et une mise en scène feuilletonesque, les excellents Nina Hoss et Lars Eidinger font ce qu'ils peuvent, distillant une émotion latente qui aurait mérité à explorer encore davantage ses racines théâtrales. **1/2

Once Upon a River: Cette adaptation d'Haroula Rose d'un livre à succès croise le road movie et le récit d’initiation dans sa façon de faire voyager une jeune femme dans l'Americana, à la recherche de ses racines familiales. Classique et monocorde, l’odyssée est visuellement et sonorement séduisante, mais ennuyante à mourir tant les éléments narratifs se veulent simplistes et généralement inopérants. **

The Marksman: Producteur de la plupart des films de Clint Eastwood depuis 2002, Robert Lornez (Trouble With the Curve) propose ici un ersatz des efforts de l'Homme sans nom (et Gran Torino en tête), alors qu'un être solitaire (Liam Neeson) doit protéger un enfant Mexicain d'un cartel de la drogue. Ennuyeux, superficiel et pétri de clichés, cette série B sur un sauveur blanc fait l'apologie des armes à feu et elle donne seulement le goût de renouer avec le grand Clint. **

Film du jour: The Comedy

Malgré son titre, The Comedy (2012) est plutôt un film sombre et déprimant sur un homme qui a tout et qui tente de créer des liens avec les autres... mais rarement de la bonne façon. Spécialiste de la provocation inquiétante, Rick Alverson pousse le bouchon - un peu loin - au sein de ce drame mélancolique malaisant, dont le rythme chancelant n'empêche pas Tim Heidecker de livrer une prestation touchante. Puis il y a la trame sonore, tout simplement excellente. ***

Film du jour: Shirley

Josephine Decker (Madeline's Madeline) ne ferait jamais un biopic traditionnel. Elle le prouve avec Shirley, où elle s'inspire de l'existence de l'immense romancière Shirley Jackson tout en y intégrant des dialogues destructeurs, de la fantaisie et une intensité qui rappelle Tennesse Williams. Le tout est alimenté d'une mise en scène sensorielle, de fabuleuses interprétations - Elisabeth Moss est inoubliable dans le rôle titre - et d'un script extrêmement fignolé qui rappelle le poids de la société patriarcale sur le dos des femmes qui n'ont parfois que la folie comme exutoire. On en ressort un peu épuisé mais surtout vivifié. ***1/2

Film du jour: Swimming Out Till the Sea Turns Blue

Reconnu pour ses importantes fictions, Jia Zhang-ke propose également des oeuvres documentaires. Sa plus récente, la bien nommée Swimming Out Till the Sea Turns Blue, donne la parole à quatre écrivains. Ce travail de mémoire permet de mieux saisir le temps qui passe, non seulement sur la Chine, mais surtout auprès de sa population qui trouve le salut dans l'art. La caméra attentive aux visages et à la parole alterne avec des moments plus fugaces où la photographie sublime la nature et les individus. L'ensemble traîne quelque peu en longueur, mais cette méditation finit par faire effet sur l'âme. À voir via le Cinéma Moderne. ***1/2

Film du jour: It Felt Like Love

Avant ses remarqués et remarquables Beach Rats et Never Rarely Sometimes Always, Eliza Hittman avait réalisé It Felt Like Love (2013), une magnifique oeuvre sur une adolescente qui aimerait connaître l'amour et le désir. Campé dans la chaleur estivale de Brooklyn, ce récit sensoriel enchante et donne froid dans la dos, montrant une jeunesse influençable (les amis, le milieu, la musique, l'Internet...) qui serait presque prête à tout pour grandir plus rapidement. La performance authentique de la nouvelle venue Gina Piersanti s'avère sidérante, tandis que la mise en scène naturaliste annonçait déjà une auteure importante. ****

Film du jour: Great World of Sound

S'il y a un cinéaste qui aime bien traiter de l’ambiguïté, c'est Craig Zobel. Oubliez son horrible The Hunt, qui était une production de studio sans âme. Le créateur de l'illustre Compliance s'est fait connaître avec Great World of Sound (2007) - produit par David Gordon Green -  qui traitait du rêve américain par l'entremise de la musique et du capitalisme. Un petit pays film qui ne payait pas de mine sur le plan technique, mais qui possédait de très bons comédiens (pros ou non) et un véritable charme mélancolique. Sans doute que la conclusion n'était pas à la hauteur des idées avancées, sauf que le reste savait comment fuir les conventions afin d'instaurer sa voix assez unique. ***

Film du jour: The Cameraman

Ultime chef-d'oeuvre de Buster Keaton, The Cameraman (1928) permet au génie du muet de briller une dernière fois avant que le studio MGM ait complètement avalé sa liberté et sa créativité. Cela donne un récit drôle, romantique et mouvementé, parsemé de morceaux d'anthologies et d'autres d'une tendresse inouïe, où le héros au visage triste est prêt à tout pour conquérir la fille, même à apprendre à filmer et à côtoyer un singe coquin. ****1/2

Film du jour: Standing Up, Falling Down

Les films sur les secondes chances sont nombreux. Standing Up, Falling Down de Matt Ratner arrive pourtant à éviter la plupart des clichés du genre grâce à la finesse de son scénario et l'efficacité de son humour. Le film compte surtout sur un duo extrêmement attachant - Ben Schwartz et Billy Crystal - qui est capable de passer des rires aux larmes en moins de deux. ***1/2

Sorties au cinéma: Wolfwalkers, The Dissident, Blizzard of Souls, Rocks

Le confinement se poursuit, ce qui n'empêche surtout pas le cinéma de qualité de se rendre disponible au commun des mortels...

Wolfwalkers: La meilleure animation de 2020 ne fut pas Soul, mais bien ce nouveau dessin animé de Tomm Moore (Song of the Sea, The Secret of Kells). Comme toujours chez ce cinéaste d'exception, il convie légendes irlandaises et familles divisées au détour d'une histoire belle à pleurer, dont l'immense soin technique et les personnages attachants donnent un relief fou à cette leçon d'amitié à connotation féministe et politique. Disponible sur Apple TV. ****

Critique

The Dissident: Fort de son Oscar pour Icarus, Bryan Fogel est de retour avec un nouveau documentaire choc, s'intéressant cette fois au meurtre du journaliste vedette Jamal Khashoggi dans l'ambassade saoudienne en Turquie. Captivant et enrageant, cet essai qui débute à Montréal rappelle les meilleurs efforts d'Alex Gibney, questionnant la liberté dans nos sociétés de plus en plus connectées. En vidéo sur demande. ****

Blizzard of Souls: Sélection de la Lettonie aux Oscars, ce récit d’initiation de Boris Frumin qui s'inspire d'une histoire vraie se déroule pendant la Première Guerre mondiale, suivant l'engagement d'un adolescent de 16 ans. Classique et patriotique, l'ensemble bénéficie d'une solide facture technique, dont la dureté des combats le rend plus crédible que 1917. Il ne faut seulement pas à s'attendre à un résultat aussi puissant que L'enfance d'Ivan qui nageait dans les mêmes aux. Disponible virtuellement dans quelques cinémas. ***

Entre le réalisme de Loach et le naturalisme de Kechiche ou Sciamma époque Bande de filles, Rocks de Sarah Gavron est une plongée assez intéressante dans le Londres multiculturel où la vie est célébrée sans trop de lourdeur. Porté par des acteurs expressifs et une éloquente direction photo, cette relecture féminine du Nobody Knows de Kore-eda en mode mineur enivre avec parcimonie. ***

Film du jour: The Death of Dick Long

Difficile de faire plus étrange que The Death of Dick Long. Même si on sait que c'est réalisé par Daniel Scheinert, à qui l'on doit l'inclassable Swiss Army Man. Son nouveau film est fait du même bois, mélangeant la comédie noire absurde au drame sincère teinté d'amitié masculine. Malgré quelques errances et puérilité du scénario, le récit plaira sans aucun doute aux amateurs des frères Coen. On peut également l'essayer uniquement pour la grande qualité de sa photographie. ***

Film du jour: Bad Education

Incroyable histoire vraie sur des hauts placés d'une prestigieuse école qui ont détourné une quantité phénoménale de fonds publics, Bad Education de Cory Finley est une étincelante satire du rêve américain, qui sait être caustique, tendre et émouvant, parfois les trois en même temps. Porté par le jeu étincelant de Hugh Jackman, ce téléfilm produit pour la chaîne HBO contient parfois plus de cinéma que de nombreuses productions du même genre qui aboutissent sur les grands écrans. ***1/2

Film du jour: Old Stone

Johnny Ma frappe fort avec son premier long métrage Old Stone (2016), plongeant un chauffeur de taxi dans un véritable cauchemar kafkaïen (ou dostoïevskien). Aider les autres ne semble pas toujours la bonne affaire et tout le monde lui rappelle au sein de cette foudroyante radioscopie de société que n'aurait pas reniée Cristian Mungiu. La tension haletante ne dérougit pas malgré une seconde partie plus prévisible et Chen Gang livre une performance renversante. ***1/2

Film du jour: Married Life

Inspiré d'un livre qui a déjà été adapté à la télévision lors des fameux épisodes Alfred Hitchcock présente, Married Life (2007) s'essaye à la fois comme satire du couple américain et mélo à la Douglas Sirk, reprenant les éléments d'un bon Woody Allen - humour, drame, suspense, sexe - pour rappeler comment l'herbe semble souvent plus verte chez le voisin. Une mécanique soignée qui tourne parfois à vide malgré une distribution impeccable, et un demi-échec pour le cinéaste Ira Sachs qui allait rebondir brillamment pour ne plus jamais décevoir. **1/2

Film du jour: Morocco

Lorsque le désir soudain de fuir la neige se fait ressentir, se replonger dans Morocco (1930) est toujours une excellente idée. Sans être le meilleur film de Josef von Sternberg, il s'agit d'un de ses plus luxueux et tortueux, tentant de réchauffer les coeurs brûlés de ses personnages tristounets. C'est surtout l'oeuvre qui a propulsé la carrière de Marlene Dietrich, développant un style unique qui a mis tout le monde dans l'ombre, dont ici le pauvre Gary Cooper. Une star est née et la voir aller s'avère un plaisir incommensurable. ****

Film du jour: Giant Little Ones

Il se fait de très bons films dans le Canada anglais. Ils n'arrivent tout simplement pas sur les écrans québécois. C'est le cas de Giant Little Ones (2018) de Keith Behrman, un récit d'initiation tendre et réaliste sur le quotidien de deux meilleurs amis qui changera du tout au tout après un party bien arrosé. C'est tout ce qu'aurait dû être le Matthias et Maxime de Xavier Dolan: un long métrage sensible et sincère, des interprètes tous épatants, une mise en scène attentive qui ne fait pas dans l’esbroufe, des choix musicaux exemplaires et un surplus de charme qui lui permet de sortir du lot même lorsqu'il arpente des chemins plus conventionnels. ***1/2

Film du jour: The Pelican Brief

À sa sortie en 1993, The Pelican Brief ressemblait un peu à un coup d'épée dans l'eau, alors que Julia Roberts et Denzel Washington s'avéraient incapables de sauver une histoire inutilement complexe. Mais en la revoyant, cette adaptation du roman de John Grisham tient davantage la route. C'est là qu'il faut oublier un peu le scénario qui fait dans l’esbroufe et s'attarder à la mise en scène maîtrisée d'Alan J. Pakula, qui puise au sein même des thrillers paranoïaques des années 70 - et son propre All the President's Men - afin de pondre un suspense nerveux et haletant. ***

Sortie cinéma: Sing Me a Song

Jour de l'an + pandémie = très peu de nouveautés en ligne et surtout en salle. On en a toutefois déniché une...

Il s'agit de Sing Me a Song de Thomas Balmès, un documentaire d'une grande beauté formelle sur l'accès à la modernité (lire ici à la télévision et l'Internet) des habitants du Bhoutan. Face au capitalisme triomphant, la spiritualité d'un jeune moine est mise à l'épreuve, alors qu'un surplus d'individualité risque de mettre k.o. sa foi en ne laissant que de la solitude. Malgré quelques moments un peu trop arrangés avec le gars des vues, le film extrêmement cinématographique déploie son venin révélateur au détour d'un rythme contemplatif où quelques scènes marquantes happent l'esprit. En ligne. ***1/2

Film du jour: The Stationmaster's Wife

Maître du mélo sentimental tordu à saveur féministe et politique, Rainer Werner Fassbinder adapte avec The Stationmaster's Wife (1977) le roman d'Oskar Maria Graf, qui s'apparente à une variation de Madame Bovary. Une histoire classique d'ennui et de séduction qui bénéficie toutefois d'une mise en scène de haut calibre (on ne compte plus les ingénieux jeux de miroirs) et d'une prestation étincelante d'Elisabeth Trissenaar. ***1/2