Le rêve
de tous les amateurs de la Playstation se réalise: une suite à
l’excellent Final Fantasy VII voit le jour sur grand écran. De
quoi faire oublier le moyen Final Fantasy : The Spirits Within paru
il y a quelques années. Si Advent Children est effectivement
supérieur à la tiède production de 2001, le résultat déçoit tout de même
beaucoup.
En 2004, par un coup de marketing
extraordinaire, la compagnie Square-Enix s’associait avec le Festival du
Nouveau Cinéma de Montréal pour montrer une grosse publicité de trente minutes
de leur dernière création Final Fantasy VII : Advent Children.
Cette façon un peu mercantile de fonctionner (dépenser près de dix dollars pour
une bande-annonce) a tout de même provoqué des salles combles à chacune des
représentations. Une année plus tard, l’histoire se répétait avec la version
finale de 90 minutes. Si les nombreuses personnes présentes applaudissaient
incessamment à la toute fin, plusieurs amateurs du plus grand jeu de rôle de
l’histoire (on parle ici de la série Final Fantasy, et non du septième épisode,
très pâle en comparaison du sixième) baillaient aux corneilles.
Avant de s’aventurer trop loin dans les méandres
de cette nouvelle édition cinématographique, il peut être bénéfique de se
rappeler comment cette série culte a débutée. À la fin des années 1980, les
difficultés financières poussent Square à mettre la clé dans la porte. Avant ce
geste imparable, la compagnie nipponne décide de sortir un dernier jeu sur la
console Nintendo : Final Fantasy. Au Japon, ce jeu de rôle
(RPG) atteint des ventes records et rejoint la mythique licence Dragon
Quest (ou Dragon Warrior en Amériques du Nord) de
Enix. Ce succès permet de renflouer les coffres et deux suites voient
rapidement le jour. Le deuxième volet était presque une extension de l’original
avec une histoire plus développée et un nouveau système de combat, alors que le
troisième allait enfin proposer des images plus intéressantes et de multiples
classes intrigantes. Si le pays du soleil levant est friand de RPG, ce n’est
pas la même chose pour le restant de la planète. Le succès de Final
Fantasy aux États-Unis en est un d’estime et la sortie de l’excellent
épisode Final Fantasy IV sur la Super Nintendo n’allait pas
vraiment faire date. Des personnages très charismatiques au sein d’un scénario
riche en intrigues, c’était suffisant pour quelques mordus. Le sympathique
cinquième épisode n’ayant jamais été distribué sur le nouveau continent, la
révolution allait débuter avec le sixième volume, facilement le meilleur RPG
jamais crée sur console. Une trame narrative à la Star Wars, des
protagonistes extraordinaires, une musique légendaire de Nobuo Uematsu et de
nombreuses quêtes connexes allaient faire de ce jeu une expérience des plus
fantastiques.
Pourtant, le public américain et européen
n’était pas encore totalement au rendez-vous. S’il est vrai que les six premiers
épisodes ne comportaient pas des graphiques à tout casser et que leur
difficulté était parfois problématique (c’est ce qu’on appelle des jeux old-school),
le destin allait changer la donne. Square rompt son alliance avec Nintendo à
cause de la misérable 64 qui continue dans l’optique de la cartouche pour
signer un lucratif contrat avec Sony et ses disques compacts où énormément
d’informations peuvent être stockées. C’est le début d’une alliance unique en
son genre. Le RPG le plus marquant de tous les temps à voir le jour était
le Final Fantasy VII sur la Playstation. Tournant autour de
l’écologie, cet épisode multipliait les héros plus grands que nature et
Sephiroth, un des meilleurs méchants (second après Kefka) de l’histoire des
jeux vidéos. C’est à ce moment que la fantaisie allait être remplacée par un
abus de la technologie. Les thèmes mythologiques sont toujours de la partie et
ce segment sera le plus rentable de la série. Par la suite, Square va pondre de
nombreux produits dérivés exceptionnels et quelques nouveaux épisodes. Final
Fantasy VIII allait créer la plus grande polémique avec son histoire
d’amour et ses combats diamétralement différents, alors que Final
Fantasy IX n’était qu’un retour nostalgique vers le passé. Le bonheur
passager continuait sur la Playstation 2 sans être de tout repos. Malgré sa
linéarité, Final Fantasy X était une œuvre riche en
rebondissements et les critiques furent nombreuses envers Final Fantasy
X-2 (une suite directe, quel manque d’originalité) et un Final
Fantasy XI) en réseau qui allait faire fuir de multiples admirateurs.
Quelques choix désastreux, comme la création de ce Final Fantasy :
The Spirits Within sur grand écran qui n’avait absolument rien à voir
avec la célèbre série. Les images extraordinaires ne compensaient pas ce
scénario plat qui n’était une énième variation de Aliens. Un échec
colossal, une perte de cent millions de dollars et une fusion avec le
compétiteur de toujours pour former la nouvelle association Square-Enix.
Répondant au souhait de tout le monde, cette compagnie allait offrir une suite
à son bébé phare sorti en 1997.
Advent Children débute quelques années après les évènements de Final
Fantasy VII. Sephiroth et Jenova ont disparu, ce qui laisse à la Shinra le
besoin de tout reconstruire. Toujours aussi torturé, Cloud ère et se cherche,
se sentant coupable de la perte de son amie Aerith. Un jour, trois mystérieux
individus kidnappent les enfants de la planète pour accéder à une source
inépuisable de materias. Dans quel but? Faire revivre le passé, ce qui pourrait
amener la destruction de la terre. Bien malgré lui, Cloud et ses nombreux
camarades reprennent du service pour éliminer cette nouvelle menace et
parvenir, peut-être bien, à un peu de quiétude.
Si l’on ignore exactement combien d’argent a
coûté cette adaptation cinématographique du célèbre jeu, il est aisé d’avancer
le terme « beaucoup » tant les images éclaboussent littéralement la
rétine. Tout y est lustré, magnifique et parfaitement reproduit. Des nombreuses
épées de l’ancien mercenaire à la fourrure de Red XIII, l’extase est totale. Le
rendu vidéo est extraordinaire, sans défaut ni anomalie. Le feu, l’eau, les
cheveux en mouvement : les détails demeurent hallucinants. Surtout que les
clins d’œil sont légions. Un Mog en peluche, une musique d’un téléphone
cellulaire qui évoque le terme d’une bataille gagnée et l’ultime bicyclette au
design imparable, il ne manque qu’un Chocobo pour atteindre le nirvana.
L’action est omniprésente du début à la fin.
Excitantes et enivrantes, ces séquences bougent dans toutes les directions,
accumulant les morceaux de bravoures, les balles de mitraillettes et les
monstres divins qui sont appelés en renfort. Il est aisé de deviner à quel
endroit The Matrix a tiré son inspiration originale. De la version publiée sur
la première Playstation. Pourtant, l’overdose est rapidement atteinte. Tout est
concentré sur les séquences rapides qui s’échelonnent beaucoup trop longtemps.
Après plus de 50 minutes où les personnages s’affrontent au sabre, il est aisé de
décrocher, de s’endormir ou de faire autre chose tant les répétitions sont
affligeantes. Un tel bourrage a rarement été vu depuis le somnifère Peal
Harbor.
Malgré cette pétarade incessante d’explosions,
le produit tombe sur les nerfs assez rapidement. L’histoire, d’une simplicité
absolue, est à mille lieux des scénarios prodigieux des jeux vidéo originaux
qui tenaient en haleine pendant des dizaines d’heures. Les personnages, d’un
vide abyssal, ne sont jamais explorés. Il y a bien la présence, inutilement
stéréotypées, de Rude et Reno, qui ne sert absolument à rien, mais les Cid,
Yuffie, Sith (sans son Cait), Vincent et Barret ne font que passer. Ce dernier
ne s’occupe nullement de sa propre fille Marlene, qui semble avoir plus de
liens avec Tifa. Quant à Cloud, il est facile de deviner la moindre de ses
pensées ou de ses actions tant il est linéaire. En contrepartie, la personne
n’ayant jamais joué au récit original ne comprendra absolument rien à cette
mascarade. La courte explication en introduction n’est pas assez étoffée et les
questions arriveront de tous les côtés. Qui est qui, qu’est-ce que le méchant
cherche et pourquoi les enfants se prennent soudainement pour ceux du Village
des Damnés? Advent Children est un film s’adressant
presque uniquement aux fanatiques de la série, une forme de cinéma qui a
beaucoup plus à voir avec les jeux vidéo que le septième art.
La musique, composée par le légendaire Nobuo
Uematsu, est très décevante. Il y a bien quelques thèmes qui reviennent comme
des leitmotivs, mais les morceaux de combats sur fond de heavy metal,
d’électronique ou d’industriel, était-ce réellement nécessaire? Surtout que
cela n’a strictement rien à voir avec les géniales pièces composées tout au
long de la série. Quant aux moments plus sérieux, pourquoi tout saturer avec
des airs sirupeux? Pour suivre ce scénario inapte aux paroles prévisibles?
Misère.
Tout amateur des Final Fantasy,
peut-être bien la meilleure série jamais crée sur une console, ne peut qu’être
déçu par une ineptie comme Final Fantasy VII : Advent Children qui
semble exister seulement pour faire de l’argent. C’est splendide et il y a trop
d’action, mais c’est à peu près tout. Il n’y a pas beaucoup de magie, de
mystère, de fantaisie, de mythologie ou même d’intérêt. C’est le moment de
recommencer une énième partie du septième volet pour le plus grand plaisir d’un
tout et chacun. **1/2
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