L’industrie des mannequins n’apparaît pas de façon très rose et glamour
dans «Girl Model», un très intéressant documentaire américain qui devrait être
montré à toutes les adolescentes de la planète.
Quelle jeune fille n’a pas rêvée de devenir mannequin? Déjà que se faire
remarquer est une chose, mais réussir à gagner sa vie ainsi en est une autre.
C’est pourtant la chance qu’offre Ashley en choisissant l’adolescente de 13 ans
Nadya. De sa Sibérie froide et austère, elle pourra faire plein d’argent en
s’envolant vers le Japon. Pourtant, la réalité est toute autre…
On image déjà le documentaire racoleur et voyeur que «Girl Model» aurait
pu être s’il avait été concocté selon la méthode de Paul Arcand. Les vétérans
cinéastes David Redmon et Ashley Sabin (ce n’est pas la Ashley du récit) n’ont pas
voulu emboîter le pas. Au contraire, leur réalisation électrisante sans être
stylisée va droit au but, suivant à la trace leurs deux héroïnes.
Nadya est la première à retenir l’attention et son destin fend l’âme
puisqu’elle a mis le pied dans un engrenage sans fin qui fait rêver mais qui
risque de la broyer au passage. En devenant mannequin, elle partira à
l’étranger pour un endroit inconnu où elle est seule, n’étant même pas capable
de se débrouiller en anglais. Tokyo la séduisante aura tôt fait de resserrer
ses griffes sur sa frêle personne, l’obligeant à revenir sur ses pas ou à
continuer coûte que coûte. À ses risques et périls, bien entendu.
Ce regard n’est peut-être pas neuf, sauf qu’il demeure éloquent. Surtout
qu’il est accompagné d’un portrait d’Ashley, une ancienne mannequin qui n’a
jamais véritablement aimé son métier et qui connaît toutes les répercussions
possibles et inimaginables. Pourtant, elle continue d’y travailler, faisant
miroiter l’argent et la renommée à des personnes extrêmement influençables.
Bien qu’elle prenne moins de place dans l’essai, c’est de ce côté que le
cinéphile retrouvera le terrain le plus fertile en surprises et en révélations
tant le sujet est à la fois attachant et contradictoire.
Utilisant de belles lenteurs langoureuses pour camper l’atmosphère la
plus judicieuse, ne lésinant pas sur les questions essentielles pour confronter
ses intervenants, «Girl Model» arrive à montrer les dessous d’une industrie qui
fait rêver. Cette même industrie qui sélectionne les personnes les plus jeunes
et les plus minces possibles pour les «vendre» à des clients qui ont tôt fait
de les exploiter. C’est dans ces moments-là que le cinéma – et particulièrement
les documentaires – prennent toute leur importance. Si ce n’est pour dénoncer,
sinon pour seulement montrer l’état du monde.
3,5/5
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