Dire que «Prometheus» était attendu est un euphémisme. Ridley Scott qui
décide d’offrir un nouveau «Alien», c’est un rêve de cinéphile qui se réalise.
Qui pourrait très bien se transformer en cauchemar parce que ce volet n’a que
peu de choses à voir avec l’original. Une fois passée cette déception, il est
tout de même possible de prendre son pied. Surtout si on est amateur de série
B.
À la fois un antépisode et un remake du classique de 1986, «Prometheus»
est le nom d’un vaisseau spatial qui transporte à son bord de nombreux
passagers vers une planète inconnue. Cette dernière serait à l’origine de la
vie sur Terre. Mais avant que les explorations scientifiques ne puissent se
tenir correctement, une menace agit en sourdine, décimant un à un ces
visiteurs…
«Alien» n’est pas un classique de science-fiction pour rien. Il a
inventé un genre, laissant des centaines et des milliers d’imitateurs sur la
touche. C’est également le long métrage qui a lancé la carrière de Ridley
Scott, un des cinéastes les plus volubiles de notre époque. Après une série
d’échecs, le créateur de «Thelma et Louise» a décidé de retourner à ses
premiers amours.
Il a toutefois oublié de bien faire ses classes. Au lieu de tout cacher
dans le noir, de dissimuler dans l’ombre, il montre ses bêtes dès les premières
minutes. Le mystère n’a donc pas lieu, renforçant le mythe que «moins on en
voit et mieux c’est». La peur et l’oppression qui caractérisaient son matériel
source ne sont également plus au rendez-vous. Il s’agit davantage d’une odyssée
épique à grand budget (le lien avec «Lawrence of Arabia » au commencement n’est
pas fortuit même si la fresque de David Lean est de plus grande nature
cinématographique) où la réalisation assurée, les fabuleux effets spéciaux et
la formidable utilisation de la 3D compensent pour les véritables frissons et
les moments d’angoisse qui font défaut.
L’essai embrasse également deux genres qui pourraient paraître aux
antipodes l’un de l’autre. Le premier est la science-fiction à la limite
prétentieuse, lente et faussement complexe. Comme si le père de «Gladiator»
voulait faire son «2001» en exposant ses théories sur la vie, la mort et le
cosmos. Du blabla qui se mute progressivement en grosse série B, ridicule et
amusante où des corps se font déchiquetés dans l’hilarité la plus totale. Tout
d’un coup, l’histoire ne se prend plus autant au sérieux, ce qui permet
quelques poursuites impressionnantes, des combats à couper le souffle et des
séquences joyeusement délirantes, à la fois absurdes et complètement
invraisemblables.
Un grand soin a été apporté aux personnages. Charlize Theron fait
oublier sa pénible prestation de «Snow White and the Huntsman», Noomi Rapace
est extrêmement sexy (et oui, ça se peut) et Michael Fassbender éclipse encore
une fois tous ses partenaires de jeu. Il possède l’être le mieux écrit, le plus
insaisissable. Sorte de mélange entre le David Bowie de «The Man Who Fell to
Earth», Hall 9000 de «2001» et «Wall-e», il est capable de faire le bien et le
mal, suivant sa propre logique interne.
N’ayant finalement que peu de choses à voir avec «Alien» tout en ouvrant
le bal d’une belle façon (mais pas de façon totalement satisfaisante, quelques
liens font défauts si l’on regarde tout de suite après «Alien»), «Prometheus» s’apparente
également au fossé qui séparait «Hannibal» (également de Scott) de son modèle
«The Silence of the Lambs». La mécanique en fait cette fois beaucoup trop,
s’avérant nettement plus lourde, tonitruante et grotesque. Ce n’est pas
désagréable à voir, il y a quelques moments très impressionnants et les
admirateurs du jeu vidéo «Super Metroid» reconnaîtront plein de similarités. Il
faut seulement ne pas avoir d’attentes envers ce «Event Horizon» qui possède
une âme, mais pas le souffle horrifique nécessaire pour vouloir y revenir outre
mesure. En espérant que Ridley Scott ne sabote pas l’essence de «Blade Runner»,
lui qui a décidé d’en faire une trilogie…
3/5
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