Film du jour: Emilia Pérez

Doublement récompensé à Cannes, Emilia Pérez est sans doute le film le plus original de toute la carrière de Jacques Audiard. Il s'agit d'une drame musical tourné en espagnol sur le chef d'un cartel mexicain qui souhaite changer de sexe! Avec ses séduisants numéros chantés et dansés, sa réalisation soignée et la dévotion de ses interprètes, il est plutôt difficile de s'ennuyer. Dommage que l'ensemble se transforme rapidement en exercice de style, tenant de la bande dessinée avec ses personnages superficiels et ses situations tirées par les cheveux, qui se concluent dans un mélo romantico-kitsch digne d'Almodovar. ***1/2 

Film du jour: Là d'où l'on vient

Lyrique et poétique, Là d'où l'on vient de Meryam Joobeur regorge d'images magnifiques qui marquent allègrement les esprits. Ce sont elles qui guident ce récit familial sous fond de radicalisation. Même lorsque l'intrigue se cherche et tourne en rond (c'est une prolongation de son court métrage Brotherhood), le souffle cinématographique demeure intact. À regarder en doublé avec Les filles d'Olfa. Au cinéma dès vendredi. ***1/2

Film du jour: La bête aveugle

Probablement le film le plus tordu de Yasuzô Masumura, La bête aveugle traite de l'étrange relation entre un sculpteur aveugle et son modèle. Si un climat d'érotisme a toujours accompagné ses oeuvres, il est décuplé dans cette fresque hallucinante, dont la dernière demi-heure ne laissera personne indifférent. À la Cinémathèque québécoise. ***1/2

Film du jour: Green Night

Étiqueté comme un croisement entre Thelma & Louise et La vie d'Adèle, Green Night (2023) s'avère plutôt un film noir décousu de la part de Han Shu. Malgré des sujets engageants (violence envers les femmes, vengeance du patriarcat et sororité) et un soin constant apporté à l'atmosphère, l'ensemble pâtit d'interprètes inégales et de sévères invraisemblances qui font (peut-être) sens lors de l'étonnante finale. À découvrir en vidéo sur demande via Film Movement Plus. **1/2

Film du jour: Xala

Avec Xala (1975), le cinéaste sénégalais Ousmane Sembène signe probablement son film le plus drôle. Il s'agit d'une satire décapante de la sphère politique et domestique, alors qu'un homme d'affaires cherche à trouver une cure à son impuissance. Les situations hilarantes se succèdent même si elles ne brillent pas par leur subtilité et la mise en scène à la fois souple et colorée ne manque pas de charme... à l'image de la plupart des interprètes. Présenté ce soir au Cinéma du Musée. ****

Film du jour: Dahomey

Après son intriguant Atlantique, la cinéaste Mati Diop demeure dans le film de fantômes avec Dahomey, qui retrace le rapatriement au Bénin de quelques trésors nationaux. Court dans sa durée mais profond et important dans ses thèmes abordés, ce documentaire d'exception n'hésite pas à flirter avec l'onirisme, laissant sa riche caméra capter l'essentiel au lieu de tout expliquer. En résulte un voyage nécessaire à travers le temps et l'espace. ****

Film du jour: Conclave

Le toujours excellent Ralph Fiennes doit veiller à la bonne tenue d'un Conclave dans le film du même nom. Divertissant mais superficiel et trop symbolique, le long métrage réalisé avec soin par Edward Burger se concentre sur le suspense et les dialogues, n'ennuyant pas une seule seconde. Ma critique complète est à lire sur Cinoche. ***1/2

Film du jour: Anora

Sean Baker frappe fort avec Anora, le portrait incandescent d'une danseuse qui s'amourache d'un de ses clients. À partir d'une prémisse rose bonbon à la Pretty Woman, le film irradie dans toutes les directions, s'avérant tour à tour hilarant et mélancolique. Un tour de force qui, même s'il traîne quelque peu en longueur, n'a pas volé sa Palme d'Or. Mon avant-plan sur le sujet est à lire dans le nouveau numéro de Ciné-Bulles. ****

Ciné-Bulles: automne 2024

La nouvelle édition de Ciné-Bulles se révèle et j'y signe quelques articles, dont un avant-plan du fabuleux film Fermer les yeux de Victor Erice, qui quitte les écrans de cinéma aujourd'hui. L'occasion est idéale de découvrir l'un des meilleurs films de l'année... surtout que les grands médias n'en n'ont pas parlé.

Film du jour: Rumours

Guy Maddin convie Cate Blanchett, Roy Dupuis et Alicia Vikander dans Rumours, un délire qui n'est pas sans évoquer le chef-d'oeuvre L'ange exterminateur de Luis Bunuel. D'abord faussement conventionnel, l'ensemble verbeux et statique se déploie au niveau du rêve et du fantasme, mélangeant les genres les plus incroyables, entre satire politique et série B sous fond de monstres. Un vrai délice! Ma critique est à lire dans le plus récent numéro de Ciné-Bulles. ***1/2

Film du jour: Le deuxième acte

Proche cousin de Yannick, Le deuxième acte permet à Quentin Dupieux de parler de cinéma et du métier d'acteur, à l'aide d'un scénario méta qui réserve de nombreux moments hilarants. La mise en scène alerte, ponctuée de longs plans séquences dialogués, ainsi que l'interprétation impeccable, de comédiens aguerris, en font une de ses oeuvres les plus truculentes et divertissantes. ***1/2

Film du jour: Miséricorde (FNC)

Le Festival du nouveau cinéma se termine aujourd'hui avec Miséricode, le nouveau (et peut-être meilleur) film d'Alain Guiraudie. Le désir mène le bal dans ce drame hors de l’ordinaire, à la fois suspense à la Chabrol et comédie très noire, où la disparition d'un homme sème l'émoi au sein de son entourage. Le scénario ne va jamais là où on s'entend, la mise en scène automnale séduit amplement et les beaux personnages se succèdent au tournant, avec une mention spéciale pour cette figure religieuse. ****

Film du jour: All the Long Nights (FNC)

Lors des jours gris, on voudra aller se lover auprès d'All the Long Nights. Dans cette oeuvre attachante de Shô Miyake, les personnages imparfaits passent leur temps à s'aider. En résulte une oeuvre à la vie et à la solidarité, bien alimentée par une mélodie minimaliste. S'il ne semble absolument rien se passer pendant deux heures, c'est au contraire toute la beauté du quotidien qui est valorisée. Présenté aujourd'hui. ***1/2

Films du jour: Grand Tour, Tardes de soledad (FNC)

Miguel Gomes (Tabou, Les 1001 nuits) est un conteur hors-norme et il fascine à nouveau avec Grand tour, qui relate la virée en Asie d'un couple qui va bientôt se marier. Récit dédoublé, soin apporté aux contes et légendes, formats d'images divers, immense travail sur le son: l'ensemble enchante et déstabilise allègrement, perdant régulièrement le cinéphile dans cette aventure ludique. d'une folle originalité. ****

Après avoir signé avec Pacifiction son chef-d'oeuvre, Albert Serra est de retour avec... Tardes de soledad, un documentaire sur la corrida! Un sujet surprenant pour un traitement fascinant, qui aborde à la fois la lutte entre la raison et l'animalité, la décadence humaine, la masculinité toxique, les traditions inutiles, etc. Par son héros, étoile montante de la tauromachie, le film dépeint un univers de solitude, où les répétitions, pierres d'assisse de la mise en scène, fait exploser la violence et le machisme. Âmes sensibles s'abstenir. ***1/2

Film du jour: Simon de la montana (FNC)

Fascinante étude de personnage, Simon de la montana de Federico Luis montre un protagoniste qui semble se métamorphoser au contact des autres. Parsemé de surprises, le récit doit tout à ses vaillants interprètes et notamment à son héros ambigu, naïf et manipulateur à la fois, qui cherche à être considéré comme un être humain. La mise en scène alerte contribue au climat de malaises en place. ***1/2

Entrevue: Roy Dupuis pour Rumours

Roy Dupuis trouve un de ses plus beaux rôles en carrière dans Rumours, où il incarne le Premier ministre du Canada. Le film, signé Guy Maddin, ne manque pas d'originalité, combinant les genres avec brio. Mon entrevue avec l'acteur québécois est à lire sur Cinoche.

Films du jour: Pepe, Motel Destino (FNC)

Il n'y a rien qui ressemble à Pepe, cet objet hybride assemblé par Nelson Carlo de los Santos Arias. Déjà l'introduction, qui mélange dessin animé pour enfant et Pablo Escobar, pique la curiosité. Puis défile un documentaire animalier avec une grosse bête qui assume la narration, une charge contre le capitalisme, un essai sur le colonialisme et un conte sur un hippopotame en cavale qui devient la métaphore de cet étranger calomnié. Les ruptures de genres sont nombreuses et l'effort traîne un peu en longueur, mais il fascine allègrement, berçant par ses images souvent somptueuses. ***1/2

Présenté en compétition officielle plus tôt cette année, Motel Destino de Karim Aïnouz séduit, déroute et irrite, parfois dans le même plan. Esthétiquement, l'oeuvre ne manque pas d'éblouir avec ses néons et la superbe photographie d'Hélène Louvart. Cela se gâche toutefois sur le plan narratif, alors que le récit prévisible et pas toujours crédible reprend le canevas classique du film noir en y intégrant des séances sexuelles qui laissent de glace sous fond de psychotropes. L'interprétation inégale et la finale oubliable ne sont pas là pour sauver cet exercice de style qui tourne rapidement à vide. **1/2

Film du jour: Praia Formosa (FNC)

L'héritage du colonialisme au Brésil est palpable dans Praia Formosa, le stupéfiant long métrage de Julia De Simone qui alterne entre passé et présent, fiction et documentaire. Le film glisse comme un fantôme, rappelant les plus grands cinéastes - comme Pedro Costa et Tsai Ming-liang - dans sa démarche rigoureuse et exigeante. L'ensemble pourrait paraître aride, mais il est sublimé par un stupéfiant travail sur la photographie. ****

Film du jour: Flow (FNC)

Du jeu vidéo à l'animation, il n'y a parfois qu'un pas. Que franchit haut la main Flow de Gints Zilbalodis, une véritable prouesse technique qui se passe de mots pour raconter l'épopée initiatique d'un chat qui doit affronter l'adversité. Visuellement, c'est la totale et si le récit narratif se révèle parfois prévisible et appuyé, il ne manque surtout pas de magie et de poésie afin de combler grands et petits. Présenté aujourd'hui et le 19 octobre. ****

Films du jour: Cu Li Never Cries, The Hyperboreans (FNC)

Si Apichatpong Weerasethakul réalisait un récit d'apprentissage, cela ressemblerait probablement à Cu Li Never Cries. Dans ce premier film, Pham Ngoc Lân décortique la société vietnamienne prise entre le présent et le passé, suivant de beaux personnages qui aspirent seulement au bonheur. Le rythme méditatif, la superbe photographie en noir et blanc et la mélancolie latente en font une oeuvre sensible et universelle, à découvrir sans se prier. Présenté aujourd'hui et le 14 octobre. ***1/2

Connus pour leur cauchemardesque animation La Casa Lobo, Cristobal Leon et Joaquin Cocina remettent ça avec The Hyperboreans, un autre essai hallucinant qui mélange les genres, les sujets et les types de supports. Entre Miguel Serrano et Guy Maddin se trouve cet ovni incroyable qui relève du rêve et de l'hallucination. Une plongée unique dans la psyché chilienne qui comporte, pour paraphraser Nanni Moretti, sa large part de WTF. ***1/2

Sortie cinéma de la semaine: Woman of the Hour

Parmi toutes les nouveautés qui prennent l'affiche cette semaine, la plus intéressante est certainement Woman of the Hour, la première réalisation de l'actrice Anna Kendrick. Inspiré d'une histoires vraie survenue dans les années 1970, le récit alterne entre les meurtres sordides d'un tueur en série et la participation d'une jeune comédienne à une émission de télévision de type Coup de foudre. Ce qui en ressort est la façon brutale que l'on traite les femmes, ce qui donne de nombreux moments effrayants. La mise en scène soignée et le jeu étonnant de Daniel Zovatto confèrent à l'ensemble un intérêt soutenu. ***1/2

Film du jour: La piel en primavera (FNC)

C'est la beauté et la monotonie de la vie qui passent dans La piel en primavera, le premier long métrage de la réalisatrice colombienne Yennifer Uribe Alzate. Sandra ne mène pas l'existence la plus palpitante, mais elle sera transformée - lentement mais sûrement - au contact des autres. Subtil et minimaliste, le récit avance par micro-révolution, il s'est n'est pas le plus surprenant, ce portrait de femme séduit, notamment grâce à la performance nuancée d'Alba Liliana Agudelo Posada. Présenté aujourd'hui et le 20 octobre. ***

Film du jour: Viêt et Nam (FNC)

Le cinéma vietnamien est en vedette cette année au Festival du nouveau cinéma. Non seulement Viêt and Nam de Truong Minh Quy est un des plus beaux titres que l'on pourra découvrir au FNC, mais c'est également l'un des meilleurs films de l'année. Il s'agit d'une histoire d'amour bouleversante contaminée par le temps, où le passé agit comme un fantôme insaisissable. Un temps que l'on ressent également physiquement, par une mise en scène implacable ponctuée de longs plans statiques, qui demande un apport aux cinéphiles pour plonger dans ce joyau qui recèle tant de beautés. Présenté aujourd'hui et le 14 octobre. ****

Film du jour: Une langue universelle (FNC)

La nouvelle édition du Festival du nouveau cinéma débute ce soir avec Une langue universelle, la plus récente création de Matthew Rankin qui aura l'honneur de représenter le Canada aux Oscars. Tendre et désopilant, cet hommage à Winnipeg et au cinéma iranien séduit d'abord par son humour, puis par sa mélancolie et sa mise en scène stylisée, qui en font une réussite sur toute la ligne. Présenté ce soir et le 18 octobre. ****

Film du jour: The Apprentice

Biopic des premières années de Donald Trump, The Apprentice d'Ali Abbasi ne manquera pas de diviser. La satire tape-à-l'oeil est plus intéressée à capter l'époque (les années 80 et 90) qu'à vraiment exploser la psychologie de son sujet. Et bien que le coeur du récit est la relation Pygmalion/Frankenstein entre l'avocat Roy Cohn (Jeremy Strong, magnifique) et Trump (Sebastian Stan, en pleine forme), il est laissé de côté lors de la seconde partie, beaucoup plus appuyée et conventionnelle. Reste que l'humour fonctionne à plein régime et qu'il est plutôt difficile de s'ennuyer. Présenté le 10 au Festival du nouveau cinéma et à l'affiche dès le 11 octobre. ***

Film du jour: The Criminal

Joseph Losey frappe fort avec The Criminal (1960), qui fut interdit sur plusieurs territoires à cause de sa violence. C'est surtout son impitoyable démonstration des prisons - plus que le classique film noir qui l'entoure - qui fascine tant elle reprend les codes de la vie de tous les jours. Stanley Baker domine une distribution masculine exemplaire et la photographie en noir et blanc est un véritable délice à regarder. ****

Film du jour: The Childe

Après une succession de films douteux (The Witch 1 et 2, V.I.P.), Park Hoon-jung (New World) se ressaisit enfin. The Childe (2023) n'est pas un grand crû et il a tôt fait d'abuser des clichés et des invraisemblances. Sauf que le rythme mené tambour battant, le mélange d'action, de violence et d'humour, ainsi que l'interprétation inquiétante de Kim Seon-ho confèrent à l'ensemble un charme certain. ***

Film du jour: Nothing but a Man

Il y a 60 ans prenait l'affiche Nothing but a Man de Michael Roemer, un film magnifique sur la difficulté d'être Noir aux États-Unis. Le long métrage n'a malheureusement jamais eu l'existence qu'il méritait et est tombé dans l'oubli. En le redécouvrant, on est happé par sa modernité, son propos puissant, sa trame narrative déchirante et sa magnifique photographie en noir et blanc Voilà un jalon important du cinéma indépendant américain. ****

Film du jour: The Wait

À la fois western, drame biblique (ancré dans l'Ancien Testament, particulièrement Le livre de Job et La loi du Talion) et suspense monstrueux, The Wait (2023) de F. Javier Gutiérrez prend son temps avant de dévoiler ses cartes, débutant dans les conventions avant de surprendre, jusqu'à sa finale dantesque. La mise en scène soignée rachète le rythme indolent et Victor Clavijo est particulièrement intense dans le rôle principal. À découvrir en vidéo sur demande via Film Movement. ***

Film du jour: Operation Fortune

Avec Operation Fortune (2023), une satire divertissante de Mission: Impossible, Guy Ritchie rappelle qu'il fera toujours le même film, qui combine action, humour et dialogues à double sens. Ce qui évite le récit d'être sur le pilote-automatique est la bonne humeur de sa distribution, qui est dominée par le duo irrésistible formé de Josh Harnett et d'Hugh Grant. ***

Film du jour Violent Panic: The Big Crash

Irrésistible satire des films policiers (un peu ce que Kitano allait réaliser presque 15 ans plus tard), Violent Panic: The Big Crash de Kinji Fukasaku est une oeuvre démente à la mise en scène excessive, où les complices, policiers et autres journalistes ne sont que des stéréotypes ambulants. À tel point qu'on ne peut que prendre parti pour le malfrat qui tente de combattre le capitalisme en place par des larcins. Après une succession de montages russes, l'ensemble se termine avec de folles poursuites qui méritent à elles seules le visionnement. À (re)découvrir en vidéo sur demande gràce à Film Movement. ***1/2

Film du jour: Despicable Me 4

Plus drôle que son prédécesseur mais néanmoins inutile et sans surprise, Despicable Me 4 de Chris Renaud allonge tellement la sauce qu'elle finit ici par manquer de goût. Du scénario prévisible à l'animation nullement révolutionnaire, il s'agit d'un énième film conçu pour faire de l'argent. Il y avait pourtant matière à mieux tant les personnages demeurent attachants (mention spéciale à Poppy). Sur le plan technique, cette édition blu-ray ne manque pas de brio et elle regorge de suppléments divertissants. (Universal) **